Benjamin Carlu est co-fondateur et PDG de Flipstory.com, une jeune startup parisienne spécialisée dans les flipbooks. Ces livres retracent en une soixantaine d'images une vidéo de 5 à 30 secondes, comme celles que l'on retrouve sur Youtube. Quelques mois seulement après son lancement définitif, Flipstory annonce l'arrivée de ses flipbooks au Brésil, en partenariat avec une chaîne de produits culturels locale.
Bonjour Benjamin. Flipstory est une jeune startup française. Pouvez-vous revenir pour nous sur sa création et son histoire ?
Flipstory a été créée il y a exactement un an. Nous avons pris le temps de développer la technologie, pour lancer une beta publique en novembre dernier, et finalement rendre la version définitive publique en mars, après quelques essais. Aujourd'hui, plus de 2 500 flipbooks ont été vendus, principalement par le biais de l'interface web.
Notre technologie permet d'intégrer notre créateur de flipbooks dans n'importe quel site Internet. Typiquement, un site comme Photoservice.com, qui imprime des albums photos, pourrait décider d'intégrer notre technologie en marque OEM. Nous nous sommes lancés après avoir attendu que notre technologie soit parfaitement au points. Nous avons réalisé plusieurs essais pour ça, d'où la période de beta assez importante. Aujourd'hui, nous y sommes, et nous allons finaliser notre première intégration avant la fin du mois vraisemblablement. C'est l'un des plus gros détaillants en produits culturels au Brésil, du type Fnac, qui va intégrer notre technologie. Je ne peux pas donner de nom pour l'instant, toutes les étapes techniques n'étant pas finalisées, mais ça devrait venir avant la fin du mois d'août.
Pourquoi avoir lancé un produit aussi "low-tech" sur le marché hi-tech ?
Parce qu'on s'est tout simplement aperçu qu'il n'y avait pas de produit qui alliait la vidéo et le toucher. Il n'y a aucune possibilité de matérialiser une vidéo, autrement qu'en la gravant sur DVD. Dans le même temps, nous avons vu une explosion des albums photo, et nous avons cherché un produit qui pourrait se ramener à ça. Finalement, on se rend compte que la majorité des petites vidéos en ligne peuvent très bien se rapporter à un objet un peu rétro comme le flipbook. Ca convient parfaitement. Pour l'impression des images statiques, toutes les technologies et moyens de distribution sont en face. Il manquait la même chose pour la vidéo.
Notre problématique est en fait la suivante : on se rend compte que les gens aiment les vidéos, et que la plupart des téléphones ou appareils photo / vidéo sont capables de filmer. Mais finalement, peu de gens les regardent après, alors que les photos, c'est assez rapide à consulter sur un écran ou un album. Beaucoup de nos utilisateurs sont contents de pouvoir retrouver un format papier à poser sur la table, qui plus est assez ludique.
Ca reste malgré tout un produit hi-tech. Il y a un algorithme puissant de transformation d'image. Et techniquement, nous gérons plus de 90% des codecs dans notre serveur. Ces codecs ne sont pas forcément difficiles à lire, et nous gérons très bien 99% d'entre eux sur les appareils courants, et les logiciels de montage grand public intégrés aux systèmes d'exploitation. Mais notre problématique n'est pas que la lecture. Nous devons aussi extraire les images, et les vérifier pour qu'il n'y ait pas d'erreur flagrante ou d'image noire correspondant à un fondu par exemple. L'algorithme s'en charge, même si nous avons une petite vérification humaine à la fin pour être sûr qu'il n'y a pas d'erreur significative.
Ce qui est plus difficile, c'est l'intégration de nouveaux codecs. Nous sommes en train d'implémenter le WebM de Google, par exemple, et il y aura toujours de nouveaux appareils, avec de nouveaux codecs... Il nous faut une à trois semaines pour les intégrer, en fonction de la phase de test. C'est un vrai travail, mais pour l'instant nous n'avons pas de retour d'utilisateur qui soit décevant.
Vous lancez votre premier partenariat au Brésil... Pourquoi pas en Europe ?
D'abord, il faut préciser que nous sommes présents en Europe. Nous fabriquons les flipbooks en France, et nous les expédions dans toute l'Europe pour un prix total de 7,99 euros. Nous nous dirigeons vers une version anglaise à la rentrée, et un site allemand avant la fin de l'année. Cela nous permettra essentiellement de toucher les pays du nord de l'Europe, et nous évaluons dans le même temps les marchés italien et espagnol pour voir ce qui est envisageable.
Pour le Brésil, le choix nous semble stratégiquement intéressant. Nous tentons à chaque fois de partir de l'approche que font les gens de la vidéo et du partage de la vidéo. Nous avons rapidement vu que le Brésil était un pays latin, catholique, et avec une dimension familiale et une culture du cadeau très implantées. Le Flipbook est idéal dans ce contexte, car c'est le Youtube pour les grands-parents. C'est un usage qui nous a étonné : nous pensions certes que la famille aurait un impact important dans nos activités, mais c'est la majorité des usages.
De plus, le Brésil est un marché très dynamique, avec beaucoup d'internautes, et beaucoup d'achats en ligne. Nous avions une vision partagée avec notre partenaire, donc nous avons préféré nous lancer avec lui. De toute façon le coût et les délais d'acheminement sont trop importants pour fabriquer en France et expédier les produits, donc le partenaire gèrera lui-même la production. Il est très bien implanté, il connait parfaitement le marché... Les avantages du partenariat ne sont pas négligeables. Et nous gardons notre énergie pour continuer à développer l'algorithme depuis la France.
Prochaine étape ?
Les lancements de la rentrée, comme je vous le disais. Ensuite, nous envisagerons peut-être une levée de fonds. Nous n'en avons pas encore réalisé, nous sommes financés sur fonds propres pour l'instant. Mais à moyen terme, c'est une réflexion que nous devrons avoir, notamment si nous envisageons des implantations aux Etats-Unis ou en Asie. Pour nous, c'est encore en cours de réflexion stratégique.
Nous envisagerons aussi sans doute dès la rentrée des partenariats avec des petits sites de partage. Des forums, typiquement liés à la famille, aux mariages, ou aux naissances, peuvent être d'excellentes cibles. C'est plus spécialisé que les grosses plateformes de partage type Dailymotion ou Youtube. Mais à terme, ce sera sans doute un objectif. Nous envisageons tout-à-fait d'aller sur de plus gros hébergeurs. Mais nous avons encore du travail avant, notamment sur la question du partage des revenus professionnels dans les partenariats. Et dans ce cadre, les forums plus spécialisés sont une bonne solution, d'autant qu'ils nous permettent de mieux cibler notre clientèle.
Je vous remercie.